Mon cher Joachim

Publié le par moncherjerome.over-blog.com

 

MauriceJuillet11_famille-033.jpgCe n'est pas sans peine que j'ai vu votre voiture de location s'éloigner, ce vendredi, le jour de votre départ... et pour cause : après 15 jours merveilleux passés en votre compagnie, qui succédaient à 15 autres jours merveilleux en France durant lesquels nous avions fait le plein de familles et d'amis, nous voici bien démunis. Enfin, heureusement que notre Juju et notre Alex national étaient là pour nous réconforter... Ainsi pouvions nous prévoir un week-end plein d'activités diverses et variées... pour profiter du soleil, de la plage, de la mer... enfin de tout ce dont on peut profiter à Maurice.

Donc au programme de ce week-end, pour faire suite à la journée cata, à la sortie ski nautique, à la soirée seggae boum boum au Nox Ex star-dance, nous voici levés de bon matin, samedi, en direction du centre de plongée de Trou, pour le baptême de Justine et Alexandre.

Malheureusement, la configuration n'est pas des meilleures : la crève de Justine s'est empirée à tel point qu'elle s'est auto-administrée uen nouvelle dose d'antibiotiques pour une semaine (j'ai beau lui dire que les antibiotiques, c'est pas automatique, rien n'y fait. La lutte contre les ganglyons passera par les antibiotiques pour notre Juju). Alex, de son côté, nous semble bien blême : alors on lui dit de bien manger, de prendre des forces, et de ne pas trop fumer avant la plongée... mais surtout de rester relax. On voit bien, même s'il tente de le cacher, qu'il est tendu comme un string.

Rendez-vous à 10h15 au centre de plongée. Nous partons à 10h15 de la maison, pour arriver à 10h30... nous nous MauriceJuillet11_famille-345-copie-1.jpgsommes mis au 'Mauritian time', comme dirait Shirley, notre proprio... c'est à dire qu'on s'habitue à être un peu en retard partout. Mais même en retard, on est en avance de 30 mn sur tout le monde. Ce qui fait que nous sommes enfin sur le bateau, face à Pierre, notre fameux moniteur, pour le brief d'avant plongée à 11h30. La pression monte. Alex ne parle plus. Justine ne rigole plus. Ils mettent leur matériel, et les voici partis pour le monde du silence... enfin, euh, Faux départ: Justine remonte très rapidement, il semble y avoir un souci... mais non, elle redescend aussi rapidement accompagnée du sculptural Jean-Paul... qui sait rassurer les demoiselles.

De son côté, Alex semble super à l'aise : je le mate de la surface de l'eau, où je nage avec masque et tuba. Il est comme un poisson dans l'eau. Bien évidemment, Nico et moi, on lui avait donné les consignes de sécurité : ne bloque jamais ta respiration, si tu as envie de vomir, vomis dans ton détendeur, si tu as envie de péter, péte sous l'eau... sinon le pire est à craindre à la remontée à la surface, une explosion de paillettes brunes te guette à la sortie de l'eau.

photosJuAlex-002-copie-1.jpgAu cas où, j'ai noté les numéros d'urgence dans mon téléphone (samu, hôpital...). Sait on jamais ce qui peut arriver.

Alors que le baptême des 'enfants' touche à sa fin (les 45 mn presque écoulées), me voici rassurée : ils vont être super contents de leur nouvelle découverte. Moi, je suis super contente que la plongée se termine, car malgré ma combi 3 mm, je me suis caillée grave dans. Ma cession de plongée masque-tuba n'a donc duré que 15 mn, je suis vite remontée sur le bateau et me suis installée sur la plate-forme à l'étage pour bronzer un peu... et me réchauffer. Pas de bol : il commence à pleuvoir. Je reste quand même, et m'installe confortablement une fois le grain passé. Et c'est là que je commence à ressentir de vagues secousses su bateau. A gauche, à droite, vas-y que je tangue de plus en plus. J'arrive à peine à lire le programme télé tellement je suis mal. Je crois que je vais redescendre à l'étage inférieur... quand Juju arrive, toute contente de sa plongée, et morte de rire ; 'Alex vient de vomir, il est sorti de l'eau et s'est senti mal. Si tu veux, tu peux aller voir'. Euhhhhh, comment te dire JU, j'ai moi-même mes amydales qui baignent. Enfin je vais rester quelques minutes de plus là-haut, dirte que l'odeur se dissipe...avant d'affronter les gens en bas.

Quand je descends, j'ai toujours envie de gerber. J'ai hâte de descendre du bateau et de rentrer à la maison me poser 5 mn.

Le seul problème, c'est que la notion même de 'se poser 5 mn' n'existe pas avec Nico. Parce que tu comprends mon Jo, les feuilles des palmiers s'agitent... C'est-à-dire qu'il y a du vent. Et qui dit vent dit Kite surf. Et voilà notre Nico au taquet pour aller faire 2 heures de kite à Anse-la-Raie. Oui, sauf que moi, j'aime bien aussi le vent depuis que je fais de la planche. Alors je lui réponds 'ben si tu fais du kite, moi je fais de la planche'. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, le kite et la planche sont dans le coffre, Nico a déjeuné, et nous voici entassés à 6 dans la voiture : Nico dans le coffre, Ju et Alex sur une place à l'arrière, moi au volant. + Le kite de Nico + la planche de Fleur.

Les jeunes, un peu éprouvés par leur matinée de plongée, préfèrent se reposer sur la plage de Cap Malheureux. Il y a pas mal de nuages... J'espère juste qu'il ne pleuvra pas.

Et nous, nous faisons route vers Anse la Raie, où de nombreux kites sont de sortie. MauriceJuillet11_famille-168-copie-3.jpg

Bon, comme tu l'as vu, la préparation du matériel est toute une affaire : sortir les planches, gonfler le kite, démêler les lignes, puis gréer la voile (eh merde, la voile de 4 m s'est déchirée... il faut mettre la plus grande), mettre le pied de mas... enfin tout ça qui met beaucoup de temps et que je ne peux pas te décrire en détail, vu que c'est toujours pas moi qui s'en occupe. Je me contente de mon côté de mettre mon lycra, mon petit shorty, ma crème solaire de visage, ma crème pour les avant-bras, mes chaussons pour ne pas marcher sur des bestioles... et le temops que j'ai fini tout ça, eh ben Nico il a aussi fini de préparer tout le matériel, et il est fin prêt à m'amener la planche pile à l'endroit d'où je dois partir... et où je suis censée revenir à la fin de chacun de mes bords.

 

Alors Nico porte ma planche, mais je vois, oh mon dieu, qu'il n'a pas mis ses chaussons. Et je vais te dire une chose : les chaussons de Nico sont un sujet de discorde, car il fait des manières... genre quand je mets mes chaussons, mon contact sensuel avec ma 'board' n'est pas le même; j'arrive pas à la faire chavirer de la même façon. Tu comprends Fleur, ce contact charnel est important car il faut que je sente ma planche.'... j'ai l'impression qu'il me parle d'une gonzesse quand on évoque le sujet de la planche... je range ma jalousie dans ma poche et insiste comme je sais si bien le faire pour qu'il mette tout de même ses chaussons. Car j'en ai ras le bol de voir ses pieds orange, ciuverts de bétadine qui salope nos draps blancs, parce que Monsieur s'est encore entaillé le pied avec une saloperie de hache d'arme.

Moi, je suis un peu tendue aussi car j'essaye pour la 1re fois une voile plus granden une 5.7. Mais ô miracle : j'avance. Vite. Le bout de ma planche se soulève, ce qui me fait pousser de petits cris 'ouh, ouh' d'émotion. Je parviens même à mettre mon harnais, et là, c'est un grand 'ouhhhhhh' de satisfaction et de sensation forte qui sort de ma bouche. Je suis la seule planchiste à Anse la Raie, les autres, kiteurs aguerris, me regardent certainement avec un air dubitatif. Mais moi, je suis fière comme un coq, car je parviens même à tourner ma voile dans l'eau. Genre quand j'ai pied, je prends le mat, j'avance lentement jusque au wishbone pour basculer ma voile de l'autre côté, aidée par le vent. Ça c'est une nouvelle compétence de la journée, et j'y arrive tellement bien que je ferais presque exprès de tomber dansle'eau pour montre à Nico que j'arrive à basculer ma voile sans être obligée de remonter sur ma planche.

C'est donc en pleine extase, le sourire aux lèvres, que je tombe. Que j'essaie de basculer ma voile... et que Oh My God, je me fais piquer le pied par une saloperie. Angoisse totale : je regarde mon pied, mon chausson est troué, je pisse le sang, je vais mourir : je viens de me faire piquer par un poisson pierre. Je crie, j'agite mes bras et laisse ma planche dériver dans les rochers. Nico arrive tranquille, me fais une petite figure. Jusqu'à ce qu'il comprenne que mon heure est proche. Alors je m'accroche à ses hanches pour qu'il me ramène au bord (nous sommes au milieu de la baie et je ne peux plus marcher), je cours, en claudiquant, voir les kiteurs mauriciens qui doivent savoir ce qu'il faut faire contre les poissons pierres. Mais non, ils ne savent pas. Alors Nico, avec sa bravoure légendaire, attrape mon pied et aspire le venin qu'il recrache. Il avale un bout de peau de pied en même temps. Il court à la voiture, appelle les numéros d'urgence (heureusement que je les avais inscrits dans mon tél) et m'emmène à toute trombe au rond point de Grand Baie, où nous attend notre ami Ritesh, pour nous emmener à l'hôpital. Car ça urge : nous avons 1heure après la piqure pour injecter l'antidote. Sinon, c'est la mort.

Ritesh monte dans la voiture, pousse Nico côté passager pour prendre le volant. Et c'est parti pour 10 mn de K-2000. 130 km/h sur les chemins de villages. 12 mn chronos pour aller de Grand Baie à l'hôpital de Pamplemousses. UN record.

Je suis à peine remise de ma nausée du matin que le trajet en voiture m'a de nouveau laissée groguie. La douleur en plus, je me laisse trainer sur un brancart en bois, une dame arrive, elle me fait 2 piqures dans les hanches. Puis un homme arrive, il me dit que je suis piquée par un poisson pierre, qu'ils vont m'administrer l'antidote, et que je vais devoir rester 2 jours à l'hôpital.

Je dis à Nico que je veux pas rester à l'hôpital, j'ai l'impression d'être dans une série TV indienne des années 70. Il y a des malades dans le couloir. Moi aussi, je suis sur un brancart au milieu du couloir. En maillot de bain avec les cheveux dégoulinants, parce que je n'ai pas eu le temps de me sécher. Et sans comprendre vraiment ce qui m'arrive, je suis toujours sur mon brancart, mais plus dans le couloir rose : on vient de m'emmener dans une salle bleue où il y a plein d'instruments dans des bacs en fer. Puis des pinces qu'un monsieur en tenue verte retire d'un four chauffé. Et aussi 2 autres mecs sur des brancarts qui ont des gros pansements et qui ont l'air de souffrir. Je ne sais pas ce que je fais là. J'aimerais bien arrêter là ma figuration pour le téléfilm indien. Mais le Dr Ramorey, que j'ai en face de moi, n'entend pas les choses de cette façon : il veut inciser le pied pour éjecter le venin. Alors là je flippe. Parce que je suis à l'hôpital public et que tout le monde m'a dit que c'était craignos l'hôpital public de Maurice.

Je pense à Guillaume Depardieu, aux maladies neusocomiales (je ne sais pas comment ça s'écrit mais tu m'auras comprise), aux séries télé indiennes, aux poissons pierres. J'ai envie de pleurer mais, pragmatique, je préfère appeler Nico et Ritesh. Ils sont juste derrière la porte de la salle d'opération (car il semble bien que la salle dans laquelle je me trouve actuellement soit destinée aux opérations d'urgence), alors je crie 'Nico, viens, j'ai peur'. Et Nico ouvre les portes de la salle, tel mon sauveur, pour venir me tenir la main. Lui aussi, il est mouillé et dégoulinant, mais c'est pas grave; personne ne lui dit rien. Alors il reste à mon chevet. Bon, il reste agenouillé pour ne pas voir le sang qui continue de couler de mon pied (parce qu'il aime pas trop le sang Nico), le seul problème, c'est qu'il voit quand même le sang de mes voisins. Parce qu'à Maurice, pas de rideau pour séparer les patients.

photosJuAlex-006-copie-1.jpgAprès quelques questions à l'homme en vert, la raison me fait finalement accepté l'incision. Une nouvelle piqure dans le pied, et voilà le médecin en vert qui s'équipe du scalpel pour faire un joli dessin sur mon pied. Je ne sens rien, même plus la main de Nico dans la mienne. Je crois que je suis en train de perdre Nico.

2 mn après, me voici de nouveau dans le couloir sur mon brancart; le pied bandé à moitié ensanglanté. Un 3e médecin arrive et me dit qu'il faut patienter : si mon pied devient violet, c'est poisson pierre. Sinon, c'est pas poisson pierre.

Si c'est poisson pierre, il faut l'antidote. Mais si on administre l'antidote et que c'est pas poisson pierre, je suis empoisonnée. Donc on attend, Nico, Ritesh et moi, dans le couloir. Le pied n'est pas violet, je veux rentrer à la maison. Mais on doit attendre. 30 mn : le médecin passe, il caresse mon pied. Il repart. 1H : le médecin passe : il tâte mon pied, il repart. 1H30 : il semble croire que ce n'est pas un poisson pierre, je vais rentrer à la maison.

Pendant ce temps, Justine et Alex, restés 2 heures sous la pluie, ont cru à une blague quand Nico leur a dit que j'étais en route pour l'hôpital. Ils ont attendu que nous arrivions puis, après 30 mn, se sont dit que ce n'était finalement peut-être pas une blague. Quelques coups de téléphone et quelques heures plus tard, les voici en route pour l'hôpital avec Clément. Bon, ils mettent un peu de temps à arriver car Clément conduit très prudemment. A 30 km/h en 5e, ils mettent 45 mn pour faire le trajet effectué par Ritesh en 12 mn. Mais ils arrivent finalement pour l'heure de l'apéro : nous sommes tous au grand complet... Clément, Ju, Alex, Ritesh, Nico, et moi, dans les couloirs de l'hôpital. Et pour donner une dimension encore plus dramatique à la situation, voilà une infirmière qui me transvase dans un fauteuil roulant... la totale!

 

Bon voilà mon Jojo le premier jour du reste des vacances de Ju et Alex, le 1er jour après votre départ... je t'avais dit qu'il ne fallait pas partir si rapidement, on avait encore plein de trucs à découvrir. Et une visite de l'île Maurice ne saurait être complète sans une visite de l'hôpital public; je te garantis que c'est une expérience sans pareil. Alors je sais que toi, côté expérience flippante, entre ton doigt découpé au cutter et ta tête assomée sur un mur de couloir, tu es assez fort. Mais on peut dire que sur ce coup là, je t'ai un peu surpassé.

Je garde mon chausson troué pour te le montrer la prochaine fois que tu viens!

 

Et je te mets aussi une photo souvenir : il ne manquait que toi et Alex pour que la réunion familiale soit au complet à l'hôpital. On y a même vu Marcel, le capitaine du Winddancer avec sa fille! Une vraie fête improvisée (on dit toujours que ce sont celles-mà les meilleures!)

 

En attendant de te donner de plus ample nouvelle de mon pied, je t'embrasse mon Jojo,

 

Ta soeurette

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